mardi 25 octobre 2011

La Chute des morts.

( Fall of the Dead: l'automne et la chute... Voyez la subtilité de la langue anglaise et les avantages considérables du bilinguisme. Ce titre en soi donne raison à Deltell, dès la maternelle, on devrait apprendre l'anglais. Le français, de toute façon, c'est tellement out...)



C’était un mardi, je crois, vers deux heures. Il faisait soleil et froid, d’aucuns diraient frais, ils vous mentiraient, on se les gelait et il faisait froid, na. Je me sentis aspiré. En fait, mon esprit ou mon âme, à votre choix, se plia étrangement. Je n’étais pas inconscient, plutôt incapable de saisir ma propre conscience qui se noyait surchargée d’informations. Aspiré puis paf! Je sentis mon bras cassé qui me faisait un mal de chien, mon épaule mordue qui m’élançait et qui dégageait une vilaine odeur. Je me sentis perdre pied et tombai sur les pavés de la Place Valois où mon corps avait trainé depuis quelques jours.

C’était fini. Je me relevai et je m’allumai une clope un peu aplatie que j’avais dans la poche de mon manteau de cuir. Autour de moi, progressivement, je vis des inconnus reprendre conscience. D’autres, avoir un soudain soubresaut et s’effondrer, mourant une seconde mort devant mes yeux effrayés. Je retournai chez moi. Partout, de nouveaux vivants, partout de nouveaux morts. Ma blonde et ma fille m’attendaient assises dans les escaliers, inquiètes.

L’épidémie avait faite plus d’un million de victimes au Québec seulement. Comme le phénomène avait été mondial, on se félicitait d’avoir été moins zombies que d’autres endroits, on comparait notre zombitude. Il y avait des témoignages à la télé; des gens qui pleuraient dans un train ou sur un plateau et qui racontaient qu’ils avaient mangé leur famille au complet et qu’ils en étaient bien tristes. « Après la pause, une femme enceinte racontera sa terrible expérience franchement dégueulasse, soyez à l’écoute. »

Le gouvernement du Québec dut payer des centaines de millions de dollars pour un vaccin qui ne servit à personne parce que l’épidémie était venue sans s’annoncer et partie sans avertir. Les centaines de milliers de personnes mortes à leur réveil parce qu’on vit plutôt mal sans cœur ou sans sang ou sans tête permirent une diminution considérable du taux de chômage. Ce qui allait clairement au-delà des attentes du Plan d’action économique conservateur… Bref, sinon les familles des morts morts, tout le monde se réjouissait.

Chopin survécut sans tête, ce chat est plus que jamais un estomac ambulant et il ronronne encore quand on le caresse. Je reconnais aujourd’hui que c’est quand même bien d’être un mort-vivant et je continue d’arpenter les ruelles du quartier en souhaitant très fort l’attaque inattendue d’un autre vieux malade.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire