mercredi 25 juillet 2012

Chapitre IV: Aventures désopilantes...

Chapitre IV : Où Aragon nous rejoint.

L’anse est séparée de la mer par un long bras de rochers qui fait que, peu importe la hauteur de la marée ou sa bassesse, les vagues ne viennent pas jusqu’à nous. Les gros moutons blancs dont je vous parlais sont là au large qui frappent cette barrière, obstinés, décidés à entrer comme le loup dans la maison de brique du dernier petit cochon.

Pour rejoindre la mer, il faut marcher. A l’ouest, un phare. Mais un vrai phare dont le faisceau lumineux… putain! Qu’est-ce qu’il fait, le faisceau ? Il pivote? Il tourne? Note à moi-même, revenir sur ce bout de phrase plus tard. Deuxième note à moi-même, je suis en vacances, laisse faire ça.

Bref, d’un pas résolu et vachement séduisant, je me décidai à partir à la conquête du phare lointain. Hop! Profitant une fois de plus de la marée basse, je marchai sur la berge qui, géologiquement parlant, est assez fascinante. Aux cent mètres environ, la couleur des rochers change, passant d’un gris roche standard à ocre puis quasi-bourgogne. Quelquefois, du sable, rarement, puis de longues étendues de pierres stratifiées, mais pas une par-dessus l’autre, les strates, non, non, elles sont à la verticale ou en diagonale, oui, oui. Ma théorie : avec le temps, elles se déplacent, lentement, très lentement, elles sont poussées, soulevées, l’effet de la tectonique des plaques.

Je passai un paquet de chalets où le drapeau du Canada et celui du Québec se côtoient. Et ça, j’haïs ça. Que tu sois fédé, ok, mets ton drapeau du Canada pis c’est ça. Mais quand tu mets les deux, tu dis que tu es content que le Québec soit une province canadienne et ça, ça m’écœure. Une province… beurk!

J’arrivai enfin au phare. Station de recherche Métis-sur-Mer. Gouvernement du Canada. Une barrière bloque l’accès par la route, cadenassée. L’ensemble des fenêtres des bâtiments, quatre au total, est barricadé, des planches peintes en rouge. Fermé. Un hangar de bois surnommé Octave, d’après l’écriteau au-dessus la porte, rappelle que des gens ont vécu, pas seulement travaillé, mais vécu et donné des surnoms à leur hangar, ici. Le gouvernement fédéral a mis la clé sous la porte. Décidément, la recherche…

Je m’installai enfin sur un des rochers qui constitue le long bras protégeant l’anse et je regardai les vagues frapper bruyamment et sans arrêt. Le vent du large sentait bon, j’étais si bien que je me levai et retournai au chalet.

***

Hier, au coucher du soleil, le ciel avait la couleur de la crème glacée à la gomme balloune. L’eau était rose et un des galets que j’ai lancé a fait au moins dix ricochets.

***

Le phénomène des campings me dépasse. Cordés les uns contre les autres, VR, tentes-roulottes, petites tentes deux places s’entassent. Les gens sacrifient leur intimité et s’installent pour deux semaines, voire plus, dans ces drôles d’endroits. Je ne comprends pas.

Je ne juge personne et j’y vois même quelque chose de foncièrement sympathique. Peut-être que le monde est écœuré d’être tout seul, écœuré de la banlieue froide, écœuré du voisinage anonyme. Peut-être que le monde est juste quétaine. C’est cool –d’une certaine façon- être quétaine. Trop de proximité pour moi. Là, tout de suite, je suis assis sur la longue galerie d’un chalet entouré d’arbres, installé sur des pilotis, à flanc de falaise. Un petit suisse est venu me voir pendant que j’écrivais. J’entends la mer et les oiseaux.

Trop sauvage pour un terrain de camping. Depuis que je suis levé, j’ai cette phrase d’Aragon avec la voix de Ferré en tête « Est-ce ainsi que les hommes vivent? ».

Je comprends tellement rien à rien.     

***

L’adolescence n’est décidément pas une période facile et surtout pas pour les parents. Un enfant de deux mois s’émerveille devant un pouce qui bouge. Un ado de seize ans regarde la mer deux minutes et dit : « Ouain, pis qu’est-ce qu’on fait astheure ? » -Et si on te clouait la langue dans le front ?, que j’ai envie de répondre.



Respire l’air marin. Regarde au loin. Rêve. Voilà ce que je me dis. Oublie cette progéniture déroutante, disons. Viens, ma belle, allons marcher sur la plage.  

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